Homélie de Mgr Hubert HERBRETEAU
Fête patronale du Monastère des Clarisses
en l’honneur de Notre Dame du Sacré-Cœur.
Chers amis, chères sœurs Clarisses,
En cette fête patronale de votre monastère, chères sœurs Clarisses, en l’honneur de Notre-Dame du Sacré-Cœur, nous ne pouvons pas oublier tous ceux, chrétiens ou non, en Ukraine ou en d’autres parties du monde, qui vivent l’épreuve de la guerre. Marie, proche de son fils mourant sur la croix, se penche aujourd’hui sur ces hommes, ces femmes, ces enfants qui connaissent l’abandon, la désespérance, la mort intolérable.
Nous savons que Marie est une Mère de tendresse. Ce que dit Isaïe au sujet de Dieu miséricordieux, Marie en témoigne de manière exemplaire : « Vous serez comme des nourrisons que l’on porte sur son bras, que l’on caresse sur ses genoux. Comme une mère console son enfant, moi-même je vous consolerai. »
Que les chrétiens puissent vivre, au cœur de leur souffrance, cette même expérience d’être soutenus et aimés par Dieu !
Le Christ de Saint-Damien
« Près de la croix se tenait sa mère ». L’Évangile de Jean cite un autre passage de l’Écriture : « Ils lèveront les yeux vers celui qu’ils ont transpercé »
Chères sœurs Clarisses, vous savez mieux que moi quelle fut l’importance du Christ de Saint-Damien, dans la vie de François et de Claire.
C’est là que le Christ, à travers cette icône, a parlé à François. C’est là, à Saint-Damien, que Claire et ses compagnes, suivant l’idéal de François, ont fondé la première communauté clarisse.
C’est là, à Saint-Damien, que François vient parfois se ressourcer et c’est là qu’il compose le Cantique des créatures. Je ne peux m’empêcher, en ce jour, en pensant à ceux et celle qui meurent en raison des guerres meurtrières à travers le monde, d’en citer les deux dernières strophes : « Loué sois-tu, mon Seigneur, pour ceux qui pardonnent par amour pour toi ; qui supportent épreuves et maladies : heureux s’ils se maintiennent dans la paix, car par toi, Très-haut, ils seront couronnés. »
« Loué sois-tu, mon Seigneur, pour notre sœur la Mort corporelle, à qui nul homme vivant ne peut échapper. Malheur à ceux qui meurent en péché mortel : heureux ceux qu’elle surprendra faisant ta volonté, car la seconde mort ne pourra leur nuire. »
François a composé ce chant en 1225 alors que son corps est délabré, souffrant de mille maux. Malgré les fatigues causées par la marche sur les routes, il venait en aide aux lépreux et autres blessés de la vie. Croire en un Dieu miséricordieux, contempler le crucifié ressuscité de Saint-Damien ne pouvait que conduire François à des « œuvres de miséricorde corporelles et spirituelles » (expression du pape François).
N’oublions pas que sur les hauteurs de l’Alverne, vivant intensément dans sa chair les souffrances du Christ sur la croix, il a reçu les stigmates aux mains, aux pieds et au côté.
Regarder Marie et le saint Charles de Foucauld
En cette fête patronale de votre monastère, en pensant à toutes les mutations et fluctuations de ce monde, à tous ceux qui sont ballotés au milieu des dangers, obligés de quitter leur pays pour les raisons que nous savons, regardons Marie, la Mère de Miséricorde. Saint Bernard nous y invite : « Dans les dangers, dans les angoisses, les doutes, pense à Marie, invoque Marie. Qu’elle ne quitte pas ta bouche, qu’elle ne quitte pas ton cœur et, pour obtenir le secours de sa prière, ne t’écarte pas de l’exemple de sa vie » (Sermon sur la Vierge 2, 17).
Comment ne pas évoquer aussi saint Charles de Foucauld qui va être canonisé dimanche prochain ?
Trois axes caractérisent sa spiritualité et forment comme un chemin d’étoiles, ou un fil rouge, au long de sa vie apparemment itinérante. En 1899 à Nazareth, alors qu’il commençait à concevoir une Règle pour les Ermites du Sacré-Cœur (qu’il appellera plus tard les Petits Frères du Sacré-Cœur), Charles écrit de quoi il s’agit : « Imiter Notre Seigneur Jésus-Christ dans sa vie cachée de Nazareth, pratiquer l’adoration du Saint Sacrement exposé et vivre en pays de mission » (Règlement 1902).
Pour Charles de Foucauld, Nazareth est le lieu de la relation avec Dieu et avec les hommes ; il croit au rayonnement de l’Eucharistie et au rayonnement d’une vie livrée et il se veut missionnaire d’une façon singulière : annoncer Jésus non par la parole mais par la vie : « Je veux crier l’Évangile, non en le prêchant mais en le vivant » (Règlement 1902).
Charles de Foucauld portait un habit blanc marqué du Cœur et de la Croix. Il avait pris pour devise Jésus Caritas, écrite en tête de toutes ses lettres, fil rouge de sa vie. Ce logo du Cœur surmonté de la Croix était pour lui « le résumé de notre religion ». « Ce Cœur écrit sur ma robe, il est là pour que je me souvienne de Dieu et des hommes pour les aimer... De toutes mes forces, je tâche de le montrer, de prouver à ces pauvres frères égarés, que notre religion est toute charité, toute fraternité, que son emblème est un Cœur. »
C’est le Cœur de Jésus, qui nous aime tellement qu’il a donné sa vie sur la Croix pour nous sauver. Que cette eucharistie, chers amis, chères Clarisses nous donne de développer en nos vies la miséricorde qui fut celle de Marie, témoin par excellence de Dieu miséricordieux et celle de saint Charles, ami des Touaregs.
Amen !
Mgr Hubert HERBRETEAU
Chapelle du Monastère des Clarisses à Nérac, le mercredi 12 mai